Thursday, November 22, 2012

HOMELESS





 
 
 
Sandra Issa, Homeless, 2012, mixed media on canvas, 100 x 100 cm
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 


Sunday, November 11, 2012

LA QUESTION DU COMBAT




LA QUESTION DU COMBAT
The Issue of Combat
Graduation Research 
2006 – 2009



Samedi 26 avril 2008



detail. livre d'artiste

Luttes Turques
Luttes Turques, livre artisanal, 2007
Octobre 2007.
“NOT ONLY POSSIBLE BUT ALSO NECESSARY OPTIMISM IN THE AGE OF GLOBAL WAR”.
Ce slogan revient sans cesse dans les rues d’Istanbul.
Affiché sur les murs, les poteaux, un peu  partout ; suspendu au-dessus des têtes qui vont et viennent en s’agitant et criant.
Ce slogan, c’est le titre de la 10e Biennale Internationale d’Istanbul. Et ces gens qui passent sont des Turcs qui encouragent leur gouvernement à la lutte armée pour éliminer le PKK, le parti séparatiste kurde.
Luttes Turques, livre artisanal, 2007



En marchant dans les rues de cette ville, ce contraste m’a paru saisissant. J’ai tenté de comprendre ces deux réalités contradictoires ensemble. Je me suis rappelée les images d’un film réalisé par Maurice Pialat appelé Pehlivan  et qui décrit le sport national turc : la Lutte à l’Huile. A partir de ces éléments, j’ai réalisé un livre que j’ai nommé « Luttes Turques ». C’est après avoir découvert le travail de l’artiste Banu Cennetoglu à Istanbul pour promouvoir le Livre d’Artiste Turc, que j’ai voulu expérimenter moi-même ce moyen d’expression.



D’une part, je vois la biennale où Hou Hanru, le commissaire, pose l’optimisme comme une nécessité dans cette époque de guerre. Il présente le travail d’artistes qui seraient les acteurs d’un combat pour la modernisation démocratique du monde. D’autre part, des rues de Turquie réclament la guerre comme une nécessité pour résoudre les problèmes, pour permettre l’optimisme. Des visions du monde s’opposent mais toutes veulent réaliser un changement nécessaire.

Ces événements ont ramené toutes les questions autour desquelles je construis ma recherche depuis plusieurs mois. L’Homme cherche à vivre et s’épanouir dans un monde meilleur en paix et en sécurité. Et il travaille pour réaliser le changement nécessaire. Mais il semble que souvent, face à un projet de vie voulu par une partie, s’oppose un autre projet voulu par une autre partie. Et pour que l’un puisse exister, il doit s’imposer à l’autre. Ainsi, chaque fois, la confrontation, l’opposition, le conflit, le combat s’imposent comme une inévitable issue. Qu’est ce que le combat ? Comment prend-il forme ? Quand s’achève-t-il ? Quel rôle joue-t-il dans le développement d’un individu, d’une partie ou d’un groupe ? La question du combat est le fondement de ma recherche.





 ARTS ET ARTS DU COMBAT



J’étudie de près les arts martiaux et les sports de combat. Depuis 2007, je parcours les lieux d’entraînement et de confrontation pour observer les différents mouvements, formes et idées du combat. Je fais des croquis pendant les cours. Il y a un aspect de rituel lors de la répétition des mouvements, pour arriver à atteindre une certaine perfection. Je cherche à m’imprégner le plus possible du mouvement qui se réalise devant moi. J’explore les possibilités du geste en dessin en adéquation avec les gestes martiaux.






La vision du geste dans la calligraphie m’a certainement influencé dans cette recherche. Le style et la gestuelle du peintre Yan Pei Ming dans son travail du portrait m’ont incité à travailler le dessin en grand format. Sur une grande surface, l’énergie doit provenir de tout le corps pour produire le trait recherché. De même que dans l’art du combat, on sollicite le corps dans sa globalité pour effectuer le mouvement efficace. Le travail des auteurs de manga tels que Jiro Taniguchi et Takehiko Inoué m’ont beaucoup appris en matière de représentation du combat en dessin.





 « L’Homme peut atteindre au perfectionnement de lui-même par l’approfondissement d’un art traditionnel. Dans le Budo (ensemble des arts martiaux japonais), cet  état est atteint par la maîtrise de techniques orientées vers le combat à mort » [Kenji Tokitsu, La Voie du Karaté, ed. Seuil]. J’aimerai explorer jusqu’où ces techniques de combat vont-ils influencer mon trait et ma technique du dessin. L’exemple de Yves Klein, artiste plasticien et judoka, me semble important quand aux possibilités de combinaison entre les arts martiaux et leur philosophie d’une part, et les arts plastiques d’autre part.






Les arts martiaux sont une méthode pour apprendre à se défendre et à vaincre un ou plusieurs adversaires. Mais c’est également une voie pour arriver à la maîtrise de soi, à la compréhension de soi et des choses à travers la confrontation à l’autre. C’est un art qui conduit à l’épanouissement de l’être. Là encore, le combat apparaît comme une nécessité pour que l’Homme se réalise. Je tente de comprendre comment plus la technique exécutée est efficace, donc mortelle, plus les mouvements qui se dessinent paraissent beaux, harmonieux et essentiels.





La lecture d’ouvrages traitant des arts du combat a nourri ma recherche. Un ouvrage majeur est le Traité des Cinq Roues de Miyamoto Musachi (ed. Albin Michel), un des plus grands samouraï japonais qui est arrivé à la maîtrise parfaite de l’escrime mais aussi de la peinture et de la calligraphie.
GUERRE ET TERRORISME


Je me suis intéressé aussi à la question du terrorisme, une forme particulière de combat. C’est un combat qui se fait clandestinement et par des armées non régulières. Ils agissent en marge des codes et règles militaires et ont donc développé des méthodes, des formes de combats différents, qui rappellent un peu les ninjas japonais. Quantité de symboles et clichés se sont développés autour du terrorisme et des terroristes. Une de leurs caractéristiques est le camouflage. J’ai réalisé plusieurs expériences autour du voile qui recouvre leur visage. Dans le contexte politique actuel, la simple vision d’un visage voilé impose l’idée du terrorisme jusqu’à effacer la possibilité d’imaginer l’humain et son histoire derrière cette  barrière de tissus.





J’ai réalisé des portraits de personnes visage voilé puis dévoilé en photographie et en peinture. Là encore, il s’agit d’hommes confrontés à la nécessité de combattre. Mais là se pose aussi la question de la place de l’individu et son rôle face à la volonté du groupe dans le combat.







J’ai essayé également de mettre en parallèle différentes situations de conflits en intervenant sur des monuments. Ces personnages de pierre que l’on rencontre dans les lieux publics sont comme des illustrations en trois dimensions des manuels d’histoire. Ils semblent venir d’une autre dimension et n’ont plus de lien avec la réalité du quotidien. Mais ces statues immortalisent des combattants qui ont défendu leur patrie et leur idéaux et qui par la suite ont été consacrés héros de la nation. En recouvrant leur visage d’un voile, je questionne leur véritable identité. Ce visage camouflé inspire maintenant la peur parce qu’il est associé aux images de guerre et de violence que véhiculent les médias. C’est le visage d’un combattant et son quotidien, c’est la guerre et la violence. Héros pour  les uns, combattant pour les autres, terroriste pour d’autres encore. Qu’est ce qui dicte la différence?

Je me dois de citer ici le travail de Rabih Mroué, Three Posters, sur l’acte du martyr/kamikaze et sur la transformation de son image et de son sens, au fur et à mesure qu’elle est divulguée réutilisée, réappropriée.
Le film Intervention Divine de Elia Suleiman m’aura inspiré quand aux différents tons possibles pour aborder certaines questions d’actualités. Il semble qu’il est parfois nécessaire de rire de certaines réalités difficiles pour ne pas s’y noyer et pour arriver à les comprendre.
En effectuant un stage aux cotés de Mario Rizzi sur son projet « neighbours », j’ai pu comprendre aussi comment il était possible de se positionner en tant qu’artiste par rapport à des évènements de l’histoire contemporaine.